Lors du dévoilement des nominations du Gala Artis 2020 la semaine dernière, de nombreuses vedettes ont tenu à souligner le manque de diversité et de représentativité parmi les 80 nommés. En effet, on ne retrouve qu’une seule personnalité de couleur, soit Pier-Yves Lord, alors que de nombreuses séries affichaient cette année des artistes issus de la diversité.
La comédienne Debbie Lynch-White faisait partie des artistes ayant dénoncé un Gala Artis encore trop blanc en partageant une publication dans laquelle elle affirmait sa déception malgré son immense amour pour son métier. « Je ne peux pas, en tant que femme blanche privilégiée ayant une tribune, ne pas exposer cette photo des nominations du Gala Artis qui, une fois de plus, démontre que notre milieu culturel, notre télévision et nos écoles de théâtre manquent de diversité. Au risque de déplaire, c’est à nous de le dire, c’est notre responsabilité si on veut changer les choses », a-t-elle notamment écrit.
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Un message qui a résonné auprès de Véronique Cloutier puisque celle-ci est souvent nommée au Gala Artis (incluant cette année dans les catégories Animateur/Animatrice de magazines culturels et talk-show ainsi que Personnalité féminine de l’année).
Bien que d’accord avec le manque de diversité, l’animatrice a tenu à rappeler que le Gala Artis fonctionne en termes de popularité, chose qui, selon elle, vient par le travail sur une longue période de temps.
« Bien dit Debbie. J'observe un réel désir de faire changer les choses dans le milieu (du moins auprès de mes collègues et patrons). On a encore beaucoup à faire, ça ne va pas assez vite. Mais bâtir des carrières solides et des « vedettes populaires » (parce que c'est de popularité dont il s'agit au Artis), ça se fait sur plusieurs années. L'inclusion, je la vois beaucoup plus maintenant : en pub, en chroniqueurs, en figuration, en deuxièmes rôles. Dire haut et fort que nous sommes solidaires, continuer d'aider les Noirs et les gens de couleur à gravir les marches, plus vite encore espérons-le », a répondu Véronique Cloutier.
Reste qu’il semble que son explication était hors contexte selon Herby Moreau, qui a lui-même dénoncé le manque de représentation au sein des nominations du gala sur son compte Instagram. L’animateur n’a donc pas hésité à répliquer en lui indiquant que le problème n’était pas en lien avec la carrière des artistes, mais bien à cause du racisme systémique.
« S’il te plaît, Véro, ta réponse est hors sujet! Tu sais très bien que ce n'est pas ça le vrai problème. Ce n'est pas une question de carrière qui se crée en plusieurs années. Le problème est plus profond que ça! Le Gala Artis est, un, une grosse mascarade qui a pour but premier de faire la promotion des vedettes maison de TVA et, deux, permette à de gros commanditaires de s'associer avec les grosses vedettes du Québec. Les autres nommés viennent faire de la figuration en se choisissant de belles robes et en restant assis. Parles-en à Celine Galipeau ou à Pascale Nadeau. »
Il poursuit ensuite en mentionnant que les personnes figurant parmi les nominations ne vont jamais vraiment changer, comme le vote du public se fait auprès de la même tranche d’âge. Il en profite pour donner l’exemple de Mélissa Bédard, une chanteuse et comédienne qui connaît un grand succès et qui pourtant ne compte pas des dizaines d’années d’expérience.
« Lorsqu'on sollicite le public par sondage pour les nominations, on prend bien soin de choisir une tranche de la population qui avantagera les mêmes vedettes année après année. On appelle ça avoir déjà les réponses avant même de les poser. C'est comme ça depuis des années. Ma chère Véro, tu sais bien que ça prend pas des années pour créer une vedette. Pour preuve, on a découvert le talent d'actrice de Mélissa Bédard en à peine une saison de M'entends tu?. Elle a obtenu une nomination aux Gémeaux. Tu l'as même reçue en »prime time » à ton émission 1res fois et elle a été extraordinaire. C'est une star! Où est-elle dans les nominations du Gala Artis? J'ai plein d'autres exemples. Ce gala est toujours pareil, ça le sera encore et encore dans 10 ans comme ce l'était il y a 15 ans lorsque j'ai participé à la création du tapis rouge et des coulisses du Gala Artis. J'étais le producteur au contenu de ces deux émissions périphériques au Gala. J'ai vu des choses, j'ai entendu des choses et c'est là que j'ai commencé à comprendre que les choses n'allaient jamais changer. »
Un fait qui n’a pas convaincu Véronique Cloutier. Encore une fois, selon l’animatrice, le vrai problème vient plutôt du fait que les personnes de couleur n’ont pas accès aux premiers rôles. Sans cette vitrine, ils n’ont donc pas la chance de se faire valoir auprès du public et ainsi être nommés.
« Moi je parlais du manque de diversité/inclusion dans des rôles de premier plan en général dans l'industrie, Herby. C'est toi qui sembles passer à côté du sujet. Les nommés dans les galas font toujours des mécontents, que ce soit par vote du public ou d'une académie. Y'a juste cinq nommés pour des centaines d'acteurs, qu'est-ce tu veux, c'est de même. Mon point est que les personnalités noires et de couleur devront avoir plus de rôles de premier plan pour avoir une vraie chance d'être nommées dans un concours de popularité. C'est ça qu'on doit dénoncer et surtout mettre en lumière. Ton point est complètement différent, je ne dis pas qu'il n'est pas valable, mais moi je le regarde dans l'ensemble. »
� cela, Herby Moreau a de nouveau mis en doute les propos de Véronique Cloutier, comme le problème de racisme systémique va bien au-delà de la culture.
« Véro, toi, tu sembles parler du manque de diversité dans les nominations des galas en général. Moi, je parle ici du Gala Artis qui fonctionne différemment. Par vote du public (paraît-il!). Alors comment j'te dirais ben ça pour ne pas froisser personne : en 2020, il y a autant de chance de voir un Noir nommé et gagner au Gala Artis que de voir un Noir intégrer le SPVQ (la Police de Québec n'a jamais eu de policier noir en 177 ans d'existence). Demande-toi pas pourquoi! Donc même s’il y a des Noirs qui obtiennent des premiers rôles, je doute encore qu'on leur donne la même visibilité que leurs confrères blancs. Je me trompe peut-être, mais j'en doute! Le problème est plus profond. Il faut casser les préjugés auprès d'une certaine tranche de la population et c'est aussi auprès de CETTE population qu'on demande de voter au Gala Artis. J'pense que c'est le bout qui manquait à ma réflexion de tantôt pour que tu comprennes », a-t-il finalement conclu.
Véronique Cloutier n’a pas répondu à ce dernier message, mais le tout prouve bien la raison pour laquelle le sujet du racisme doit continuer d’être débattu et étudié pour faire avancer les choses.